Décision CNDA n°09016933

Mots clés :
Ps-c, situation de violence généralisée dans la province de Ghazni, individualisation de la menace

Analyse de la décision

Faits et procédure :

Le requérant est de nationalité afghane et d'ethnie tadjike. Il soutient qu'il est exposé à des menaces en raison du travail de son père (lui-même assassiné) considéré comme collaborateur des forces étrangères présentes dans le pays.


Après avoir fait une demande d'asile auprès de l'Ofpra qui a été rejetée, le requérant forme un recours devant la CNDA, qui examine sa requête dans la présente décision.

 

 

Question(s) juridique(s) soulevée(s) :

 

La province de Ghazni en Afghanistan peut-elle être considérée comme une zone de violence de haute intensité résultant d’un conflit armé, dans laquelle la seule présence du requérant constitue un risque pour sa sécurité ?

 

Solution :

 

Les craintes énoncées par le requérant en raison du travail de son père semblant invraisemblables au juge, qui lui refuse le statut de réfugié.

 

Néanmoins, il est établi que le requérant provient de la province de Ghazni et le juge considère cette zone comme affectée par une violence généralisée liée à un conflit armé. Estimant que dans ce contexte, le requérant, un orphelin de 23ans, peut être la cible de recrutement forcé, la protection subsidiaire de l'article L712-1 c) du Ceseda lui est accordée.

 

 

Portée :

 

Dans la présente décision, il est évoqué que la violence ne cesse d'augmenter en Afghanistan et particulièrement dans la province de Ghazni. Néanmoins, et si la protection subsidiaire relative aux conflits armés (art. L. 712-1, c) est accordée au requérant,  il est précisé qu’il encourt un risque particulier en raison de sa situation personnelle.

Le juge a ainsi pris la décision d'individualiser les craintes, notamment en raison de son jeune âge et de son genre qui le rende vulnérable à des tentatives d'enrôlement par exemple.

 

Cependant, d'après les décisions de principe de la CJUE ( 17 février 2009 Aff.C-465/07, époux Elgafaji) et du Conseil d'Etat (3 juillet 2009, n°320295, Baskarathas), l'individualisation des craintes doit être inversement proportionnelle à l'intensité de la violence, ce qui signifierait que, pour la présente décision, le juge considère la violence comme de basse intensité. Ce choix peut alors sembler paradoxal avec les éléments développés par le rapport du secrétaire général de l'ONU du 10 mars 2010 et repris dans la présente décision.

 

Depuis cette décision, la jurisprudence sur la violence du conflit en Afghanistan a évolué, tendant à l’octroi d’une protection à une très large part des Afghans demandeurs d’asile en France. En effet, un jurisprudence a émergé, confirmée par le Conseil d’Etat (CE, 16 oct. 2017, n° 401585)  selon laquelle tous les civils afghans même s’ils viennent d’une zone moins frappée par les violences du conflit, sont en droit de bénéficier de la protection subsidiaire puisqu'ils sont contraints, en cas de retour dans leur pays depuis la France, de traverser Kaboul qui fait l'objet d'un niveau de violence aveugle de haute intensité (par la suite dénommée « intensité exceptionnelle) pour regagner les autres régions afghanes. 

Statut de la décision : Octroi protection subsidiaire