Décision CNDA n°12017575

Mots clés :
Violence généralisée résultant d'un conflit armé interne ou international ; Provenance non établie ; impossibilité d'évaluer la menace grave directe et individuelle

Analyse de la décision

Faits et procédure :

Le requérant soutient qu'il est de nationalité somalienne originaire d’Afgooye et qu'il craint en cas de retour dans son pays pour plusieurs raisons : son appartenance au sous clan Geledi ; sa condamnation à mort par des miliciens d'Al Shabab ; la situation de violence généralisée prévalant dans sa région.

 

L’Ofpra a rejeté sa demande de protection et la CNDA se prononce, dans la présente décision, sur le recours formé contre ce rejet.

 

Question(s) juridique(s) soulevée(s) :

  • A quelle protection est éligible un Somalien dont l’origine géographique est sujette à caution ?

 

Solution :

 

En raison de plusieurs éléments (empreintes digitales illisibles, permis de conduire dont l’origine est remise en cause, déclarations jugées non convaincantes sur sa région d’origine), la Cour n’établit ni les craintes de l’intéressé au regard de la Convention de Genève, ni sa région d’origine en Somalie.

 

Ne pouvant établir sa provenance d’Afgooye, ville dans laquelle la Cour relève pourtant des atteintes graves aux civils résultant du conflit armé en cours sur place, le juge considère qu’il ne peut évaluer les atteintes graves auxquelles le requérant serait exposé dans le conflit au sens de l'article L712-1c) du Ceseda.

 

Portée :

 

A l’exception des cas dans lesquels il est considéré qu’un conflit armé atteint de manière uniforme l’intégralité du territoire d’un Etat (par exemple pour la Syrie en 2018, CNDA, 3 juillet 2018 n°17021233), l’évaluation du niveau sécuritaire par la CNDA se fait au niveau local.

Aussi, il ne suffit pas pour le demandeur de prouver être originaire d’un pays en guerre, mais il lui revient de démontrer qu’il provient d’une zone affectée par la violence du conflit.

En l’espèce, la nationalité somalienne du requérant n’était pas remise en cause, mais il n’a pas convaincu de son origine d’Afgooye. Dans un tel cas, la Cour considère qu’elle ne peut évaluer les craintes qu’il éprouve en cas de retour dans son pays.

Cette position pourrait être revue à la lumière de jurisprudence postérieure qui octroi des protection aux civils de certains pays en guerre, indépendamment de leur région d’origine dans le pays, si les points d’entrée dans le pays sont affectés par une violence généralisée de haute intensité (aujourd’hui dénommée « violence aveugle d’intensité exceptionnelle »). Ca a été le cas pour les Irakiens devant passer par Bagdad en 2016 ( CNDA 11 avril 2016 Mme H. épouse E. n° 15018700 C), ou encore pour les Afghans devant rentrer par Kaboul (CNDA, 6 janv. 2017, n° 16005156).

Dans un tel cas, même si la région d’origine est sujette à caution, le seul fait d’être un civil originaire du pays permet l’octroi de la protection subsidiaire de l’article L. 712-1, c) du Ceseda.

A noter que de manière étonnante dans la décision d’espèce, la Cour relève des éléments relatifs à la violence à Afgooye, alors même que cela n’était pas nécessaire puisqu’elle ne considérait pas que le demandeur en était originaire. Et, n’allant pas jusqu’au bout de son raisonnement, elle ne qualifie pas le niveau de violence découlant des éléments qu’elle a relevé sur la situation sécuritaire, si bien que la décision n’a pas, sur ce point, le mérite d’apporter une éventuelle actualisation, en mars 2013, de l’évaluation du niveau de violence par la Cour.

Statut de la décision : Rejet