Décision CNDA n°15005004

Mots clés :
Protection subsidiaire, violence aveugle généralisée de haute intensité, résolution de l’ONU

Analyse de la décision

Faits et procédure :

A l’appui de sa demande de protection, une requérante sud-soudanaise soutient qu’elle craint d’être exposée à des persécutions ou à une atteinte grave en cas de retour dans son pays d’origine.

 

L’OFPRA a rejeté sa demande. Dans la présente décision, la CNDA se prononce sur le recours formé contre cette décision de rejet.

 

Question(s) juridique(s) soulevée(s) :

 

Les Sud-soudanais peuvent-ils voir leurs craintes examinées à l'égard du Soudan ?

 

La République du Soudan du Sud est-elle en proie à un conflit armé au sens de l’article 712-1, c) du Ceseda ?

 

Solution :

Dans cette décision le juge avance que la demande de la requérante doit être examinée au vu de sa nationalité, la République du Soudan du Sud. En effet, la République du Soudan, depuis 2011, n’accorde plus la nationalité aux ressortissants de la République du Soudan du Sud, en revanche, les autorités administratives de la République du Soudan du Sud sont compétentes pour délivrer la nationalité.

 

Il considère ensuite que la requérante n’est pas éligible au statut de réfugié mais examine ses craintes à l'égard de la situation prévalant au Soudan du Sud, en particulier à Juba.

 

Il observe à ce sujet que depuis la création de la République du Soudan du Sud en 2011 la situation sécuritaire s’est dégradée sur place. En effet, le Conseil de Sécurité de l’ONU dans une résolution n°2206 condamne les atteintes aux droits de l’homme dont la République de Soudan du Sud se rend coupable (viol, violences sexuelles, disparitions forcées, détentions arbitraires etc.). De plus, le Haut-Commissaire aux Réfugiés dans une publication de juillet 2015 avance que 730 000 personnes ont dû se déplacer afin d’échapper à ce climat de violence généralisée.

 

La République du Soudan du Sud doit alors être considérée comme une zone de violence de haute intensité résultant d’un conflit armé au sens de l’article 712-1, c) du Ceseda et la protection subsidiaire accordée à la requérante.

 

Portée :

Dans cette décision le juge avance que la République du Soudan du Sud est en proie à un climat de violence aveugle généralisée de haute intensité résultant d’un conflit armé.

 

On peut relever qu'en l'espèce, le juge se prononce que le niveau de violence sur l’ensemble du pays (il qualifie « la situation prévalant en République du Soudan du Sud et à Juba de violence généralisée de haute intensité ») et ne se concentre pas, comme il le fait habituellement, uniquement sur la zone  d'origine du requérant, cela démontre la gravité de la situation tant ce raisonnement est plutôt rare.

 

En vertu de cette décision, tous les ressortissants de la République du Soudan du Sud, s’ils sont considérés comme des civils, sont éligibles à la protection subsidiaire (Ps-c), tant que la situation sécuritaire sera considérée aussi incertaine.

 

En 2017, examinant de nouveau la situation sécuritaire, mais cette fois, uniquement à Juba, le juge de la CNDA a conclu au même niveau de violence et ajouté que la capitale était le seul point d'entrée du pays depuis l'international, tout Sud soudanais pouvait être exposé à la violence de haute intensité pour rejoindre sa zone d'origine (CNDA 13 novembre 2017 M. M. n° 16038980).

Statut de la décision : Octroi de la protection subsidiaire