Décision CNDA n°581505

Mots clés :
Violence généralisée, civils, protection subsidiaire

Analyse de la décision

Faits et procédure :

 

A l’appui de sa demande de protection, un requérant sri-lankais d’origine tamoule soutient qu’il craint d’être exposé à des persécutions ou à une atteinte grave en cas de retour dans son pays d’origine où il a été victime d'arrestations arbitraires et de graves violences.

 

L’OFPRA a rejeté sa demande. Dans la présente décision, la CNDA se prononce sur le recours formé contre cette décision de rejet.

 

Question(s) juridique(s) soulevée(s) :

Le Sri Lanka est-il affecté par un conflit armé mettant en danger les civils ?

L’origine géographique peut-il être un élément d’individualisation ?

 

Solution :

Après avoir refusé la qualité de réfugié au requérant, le juge relève que le conflit armé au Sri Lanka ne vise pas uniquement les Tamouls mais que le contexte au Nord et à l’Est du Sri Lanka est caractérisé par un climat de violence généralisée résultant d’un conflit armé au sens de l’article L. 712-1, c) du Ceseda.

En effet, le gouvernement sri-lankais a décidé en janvier 2008 de rompre le cessez le feu en place depuis février 2002. Ce climat a des conséquences graves sur les civils, ces derniers sont contraints de se déplacer.

Pour ensuite considérer que le requérant est exposé à une menace grave, individuelle et directe au sens de l’article L. 712-1, c) du Ceseda, et lui accorder la protection subsidiaire, le juge se base alors sur sa zone de résidence qu’il estime particulièrement exposée au conflit.

 

Portée :

 

Dans cette décision, après avoir constaté l’existence d'un conflit armé affectant le Sri Lanka, le juge cherche à individualiser les craintes du requérant. En effet, à cette période la CNDA cherchait à individualiser les craintes de l'ensemble des requérants issus d'une zone de conflit, peu important le niveau de violence sévissant dans la région d'origine du requérant (pour exemple, CRR, SR, 17 février 2006, 416162).

 

Pour se faire, en l'espèce, il se fonde sur l’origine géographique de ce dernier et sur le niveau de violence sur place. Le juge relève ainsi que le Sri Lanka, et particulièrement le Nord-est, est sujet à une guerre civile, responsable alors d’un climat de violence généralisée d'une particulière intensité résultant d’un conflit armé au sens de l’article L. 712-1, c) du Ceseda. Il relève à cet égard de nombreuses exactions commises contre les civils (enrôlement de forces des enfants, attentats, violations des droits de l'homme etc.).

 

Le juge fait donc ici de l'origine géographique, l’élément d'individualisation des craintes du requérant au sein du conflit armé.

 

Aujourd’hui, dans une situation similaire, et au regard des jurisprudence de la CJCE et du Conseil d'Etat intervenues en 2009 ((CJCE, 17 février 2009, Meki Elgafaji et Noor Elgafaji c. Staatssecretaris van Justitie et CE, 3 juillet 2009, 320295), le juge qualifierait d’abord le niveau de violence présent dans la zone d’origine du requérant et non pas dans tout le pays, puis, en fonction du niveau déterminé, le juge chercherait alors à individualiser ou non les craintes du requérant.

 

Ainsi, si la même situation était examinée à l'aune des pratiques actuelles de qualification du niveau de violence, la situation au Sri Lanka serait considérée comme une violence aveugle intensité exceptionnelle (anciennement violence de haute intensité). C'est d'ailleurs l'orientation que la CNDA a prise entre l'arrêt Elgafaji de février 2009 et la fin du conflit au Sri Lanka (par exemple, CNDA, 13 mars 2009, n°580861).

Statut de la décision : Octroi de la protection subsidiaire